Le XIXe siècle de 1860 à 1914

De 1860 à 1914, des progrès ont commencé à se faire ressentir dans la vie quotidienne. Le nouveau département des Alpes-Maritimes connaît son premier grand essor de reconstruction après l’épisode italien.

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Le nouveau département dépend en très grande majorité de la ville d’Aix, les pouvoirs religieux, administratifs et exécutifs y sont transférés. De nouvelles communes sont créées.

La loi du 23 juin 1860 crée le département des Alpes-Maritimes

  • Il est composé de trois arrondissements :
    • Deux issus de l’ancien comté : Nice et Puget-Théniers (ce dernier arrondissement sera supprimé en 1926),
    • Et l’arrondissement de Grasse, détaché du département du Var.
  • 2 février 1861 : première réunion du Département.

La convention du 7 mars 1861 précise les frontières entre la France et le Piémont

  • Tende et la Brigue restent piémontaises.
    • Officiellement pour permettre à Victor-Emmanuel II de conserver ses territoires de chasse.
    • En réalité pour des raisons stratégiques (les Piémontais restent maîtres de la ligne des crêtes).
       

La justice et l’enseignement

  • La Cour d’Appel de Nice (nouveau nom donné depuis 1848 à l’ancien Sénat) est supprimée malgré l’hostilité des niçois. Les Alpes-Maritimes dépendent de la cour d’appel d’Aix.
  • Nice perd également ses établissements d’enseignement supérieur.

L’église

  • 1860 - L’évêché de Nice, qui ne comprend alors que l’ancien comté de Nice, fait désormais partie de la province ecclésiastique d’Aix.
  • 1887 - L’arrondissement de Grasse qui, en 1860 est maintenu dans le diocèse de Fréjus, est rattaché au diocèse de Nice.
     

Création de nouvelles communes

Création de nouvelles communes
DateNouvelle communeDétachée de la commune de
1867PeymeinadeCabris
St-Martin-du-VarLa Roquette
1871FontanSaorge
RevestTourette-Château
1874CastagniersAspremont
ColomarsAspremont
1891BeaulieuVillefranche
1904BeausoleilLa Turbie
St-Jean-Cap-FerratVillefranche
1908Cap d'AilLa Turbie
1910SpéracèdesCabris
1911BendejunChâteauneuf de Contes
1913CantaronChâteauneuf de Contes
1926BlausascPeille
1929ThéouleMandelieu
 

2 février 1861 - Traité franco-monégasque

La France verse à la principauté une indemnité de quatre millions de francs en compensation de la perte de Menton et Roquebrune.

Le désenclavement des voies de communication va passer en premier lieu par les routes puis par les voies ferrées. Au niveau routier, trois types de routes vont être aménagées, au niveau ferroviaire, de nouvelles lignes vont faire leur apparition.

Le désenclavement des Alpes-Maritimes : les routes

  • Les routes des vallées (qui remplacent les routes de crêtes abandonnées).
    • La Vésubie - La première route, qui passe par Levens et Duranus, atteint Lantosque en 1863, Roquebillière en 1870, Saint-Martin-Vésubie en 1877.
      La route de Saint-Martin-du-Var est ouverte en 1896.
    • La Tinée - La route atteint Saint-Etienne en 1896.
    • Le Var - A partir de 1861 construction de la route sur la rive gauche du fleuve (1868 : Puget-Théniers, 1879 : Entrevaux, 1883 : Guillaumes, 1885 : Entraunes, 1914 : col de la Cayolle).
  • Les routes du bord de mer entre Nice et l’Italie.
    • La basse corniche - 1862 : Villefranche, 1866 : Beaulieu, 1883 : Monaco.
    • La moyenne corniche - 1910 : ouverture des travaux, ralentis par la guerre.
  • 1903 : ouverture de la “corniche d’or” entre Théoule et Saint-Raphaël.

Le désenclavement des Alpes-Maritimes : les voies ferrées

De Marseille à l’Italie (compagnie PLM)

  • D’abord, une voie unique :
    • 10 avril 1863 : le premier train en provenance de Paris arrive à Cagnes.
    • 1862, 1864 : construction du pont sur le Var (en aval du pont en bois) en fer et en fonte, qui doit porter la voie ferrée et la route impériale n° 7.
    • 26 septembre 1864 : le premier train arrive en gare de Nice.
    • 26 octobre 1864 : la ligne Paris-Nice est ouverte aux voyageurs.
    • 19 octobre 1868 : le train arrive à Monaco qui sort de son isolement.
    • 6 octobre 1869 : ouverture de la ligne Monaco-Menton.
    • 25 janvier 1872 : la voie ferrée est prolongée jusqu’à Vintimille.
  • Le doublement de la voie :
    • 1881 : Fréjus-Nice, 1892 : Nice-Villefranche et Monte-Carlo-Roquebrune.
    • 1893 : Villefranche-Monaco, 1897 : Roquebrune-Menton (prolongée à Vintimille après 1918).
  • Le chemin de fer joue la carte du tourisme de luxe ; 1876 : premières voitures-lits Paris-Menton, 1882 : premières voitures-restaurants Paris-Nice.

Deux lignes exploitées par la compagnie des chemins de fer du sud de la France

  • Nice-Colomars-Draguignan-Meyrargues (Bouches-du-Rhône).(1891)
  • Nice-Digne par la vallée du Var. La construction de la ligne à voie unique et étroite s’échelonne de 1890 à 1912, date à laquelle la ligne est totalement exploitée.

Création de lignes de tramways électriques pour desservir, à partir de Nice, les vallées du Paillon, du Var et de la Vésubie.

  • 10 février 1906 - 14 lignes de tramways sont déclarées d’utilité publique.
  • En 1910, le tramway atteint Saint-Martin-Vésubie par Plan-du-Var (3 h 15).

Le réel essor touristique se fait en 1860, l’accessibilité du département est une force et est directement liée à son expansion touristique. C’est un tourisme d’hiver qui prend petit à petit place au sein du département. La Côte attire les familles royales, les aristocrates. Le tourisme azuréen est à la base un tourisme de luxe.

L’afflux touristique s’amplifie à partir de 1860

  • Le chemin de fer, en rattachant l’ancien comté de Nice à l’espace économique français et en permettant à un grand nombre de personnes de se rendre sur la côte, est le facteur essentiel de l’expansion du tourisme.
  • La fonction d’accueil est strictement saisonnière.
    • La Côte s’anime l’hiver, la saison débute fin novembre et se poursuit jusqu’au début mai. Le séjour des touristes est long, il dure plusieurs mois. Après une brillante saison hivernale, la Côte devient déserte l’été. L’apogée du tourisme d’hiver se situe entre 1880 et 1914.

Le tourisme est de caractère aristocratique

  • La Côte attire les souverains et les membres des familles royales.
    La reine Victoria passe en 1882 l’hiver à Menton et réside à Cimiez de 1895 à 1899. Le tsar de Russie et la tsarine arrivent le 21 octobre 1864 (Saint-Pétersbourg-Nice : 30 heures). En 1888 l’empereur du Brésil, Pedro II, séjourne à Nice. Léopold II, roi des Belges, achète des propriétés au Cap-Ferrat et à Villefranche.
  • La Côte attire une clientèle de luxe : hauts personnages de la politique et de la finance, écrivains et artistes. 1887, Stephen Liégeard publie un ouvrage de voyage “Guide de la Côte d’Azur”. La présence d’une importante clientèle de luxe provoque un afflux massif de capitaux, en particulier dans l’immobilier. En 1892, Henri Germain, fondateur du Crédit Lyonnais, ouvre le boulevard de Cimiez et est ainsi à l’origine de la fortune de ce quartier.

A l’est du Var, le tourisme ne se limite pas à Nice (ce qui était le cas avant 1860) :

  • Grâce à la construction du chemin de fer et de la basse corniche, la poussée touristique se déclenche rapidement le long du littoral jusqu’à Menton. Beaulieu, qui en 1872 est un hameau de 224 habitants, possède trois hôtels en 1882.

Le tourisme est à l’origine d’une riche agriculture florale

  • Ce sont des non-Niçois qui ont créé cette richesse : les hivernants sont les premiers acheteurs et les premiers expéditeurs de fleurs.
  • En 1885, entre la fin des mois d’octobre et d’avril, 60 000 colis de fleurs sont expédiés par la gare de Nice.
     

Nice

  •  L’expansion hôtelière (nombre d’hôtels : 1862 : 35, 1900 : 130, 1914 : 200).
    • L’hôtellerie de luxe est un phénomène nouveau (auparavant, les gens fortunés descendaient dans des villas). Le personnel hôtelier travaille 14/15 h par jour et n’a pas de congés. Les pourboires constituent l’essentiel de sa rémunération.
    • Elle se fait d’abord sur les hauteurs. A partir de 1885, Cimiez se couvre de vastes hôtels (Riviera Palace, Excelsior Regina, Majestic…).
    • Au début du XXe siècle, des hôtels sont construits au bord de la Méditerranée. 1912 : Négresco, 1913 : Ruhl (1862 : premiers palmiers plantés sur la Promenade des Anglais).
  • Les casinos : le premier casino est ouvert en 1884 à l’est de la place Masséna sur la voûte du Paillon (dont la couverture est prolongée jusqu’à la mer). En 1891, ouverture d’un casino avançant sur la baie des Anges (jetée-promenade, architecture néo-mauresque). En 1883, un premier casino avait été détruit par un incendie la veille de son inauguration. En 1914, cinq casinos.
  • Les fêtes
    • 1868 - course de chevaux sur l’hippodrome de la Californie à l’embouchure du Var.
    • 1873 - réorganisation du carnaval en un spectacle discipliné avec thème central.
    • 1876 - première bataille de fleurs sur la promenade des Anglais.
    • 1897 - première course automobile Marseille-Nice.
    • 1914 - grand meeting d’aviation.

Antibes

  • La ville, dont les fortifications du XVIIe siècle sont démolies de 1894 à 1900, reste à l’écart du mouvement touristique (quelques centaines dhivernants en 1914).

Cannes

  • La modeste agglomération de pêcheurs devient en 50 ans la station la plus élégante de la Côte d’Azur, autour de la Croisette (premiers travaux d’aménagement entre 1865 et 1872).
  • 1907 : casino de la Croisette.
  • 1912 : hôtel Carlton.

Menton

  •  En 1855, un médecin anglais jugeant le climat favorable pour les pulmonaires fait venir de nombreux tuberculeux (logés chez l’habitant). En fait le climat tue les malades plutôt qu’il ne les guérit (construction du “cimetière des étrangers”).
  • A partir de 1880, de riches hivernants, qui succèdent aux malades, font construire de somptueuses villas dans la baie de Garavan et au cap Martin.

Monaco (1861 : 1 200 habitants - 1913 - 23 000)

  •  1879 - Inauguration du vaste casino bâti par Charles Garnier.
  • 1887 - Création du diocèse de Monaco (détaché de Nice).
  • Albert Ier (1889-1922). Musée d’anthropologie (1902). Musée océanographique (1910).
  • 1911 - Création du rallye automobile de Monaco.

La population du haut pays, est peu importante et touchée par l’exode rural. Se retranscrit alors un déséquilibre démographique entre l’ancien comté de Nice et l’arrondissement de Grasse. Mais dans l’ensemble, le département des Alpes-Maritimes connaît un dynamisme démographique.

Les résultats des recensements

1861 = 194 500 habitants (ancien comté de Nice = 124700, arrondissement de Grasse = 69 800).

Résultats des recensements
En milliersAlpes-MaritimesVarBasses-AlpesFranceRemarques
1 861194,5315,5146,337 386(*) perte de l’Alsace et d’une partie de la Lorraine
1 872199,0293,7139,336 108 (*)
1 881226,6288,5131,937 672
1 891258,5288,3124,238 343
1 901293,2326,3115,038 962
1 911356,3330,7107,239 605
 

On retirera de la lecture de ces statistiques les conclusions suivantes :

  • Déséquilibre démographique entre l’ancien comté de Nice et l’arrondissement de Grasse,
  • Vitalité démographique des Alpes-Maritimes,
  • De 1861 à 1911, la population du département croît rapidement : + 83 %,
  • La population française de 1872 à 1911 augmente d’à peine 10 %,
  • Le département du Var, plus peuplé que celui des A-M au XIXe (malgré un fléchissement à la fin du siècle) est dépassé par les A-M en 1911,
  • Le département des Basses-Alpes, montagneux et isolé, se dépeuple : - 27 %.

Le haut pays

La population, peu importante et touchée par l’exode rurale, connaît une évolution que l’on peut comparer à celle des Basse-Alpes.

CantonDate et maximum de populationCantonDate et maximum de population
Breil1861 – 6062Coursegoules1836 – 3799
Guillaumes1822 – 5525Lantosque1848 – 4743
Puget-Théniers1848 – 3681Roquebillière1848 – 6163
Roquesteron1848 – 3959Saint-Auban1836 – 4445
Saint-Etienne1848 – 4114Saint-Sauveur1848 – 4671
Sospel1848 – 5659Villars1848 - 4240

A l’exception du canton de Breil, les cantons du haut pays ont atteint leur maximum de population dès 1848. La dépopulation commence sous la restauration sarde.

Le littoral - L’essor du tourisme

 18561911 18561911 18561911
Cannes5 80029 600Cagnes2 2005 000Beausoleil 8 300
Le Cannet1 6004 100St-Laurent7802 200Monaco1 20015 600
Antibes6 50012 100Nice44 000143 000Roquebrune8505 300
Vallauris2 5008 000Villefranche3 0004 700Menton4 80018 000

C’est l’immigration qui explique l’essor démographique. Nice se peuplera d’Italiens (paradoxe : quand elle devient française)

Développement des professions liées à la fonction d’accueil, hôtellerie, commerces, banques, bâtiment, agriculture.

Entre eau, gaz et électricité, de 1864 à 1911, une importante amélioration de la vie quotidienne des habitants du département se met œuvre.

L’alimentation en eau

  • 1864 - La ville de Nice organise un service public de distribution de l’eau et délègue la gestion du service des eaux à la Compagnie Générale des Eaux.
  • 1866 - L’aqueduc de Sainte-Thècle amène à Nice l’eau du Paillon et alimente la ville en eau potable. On installe des fontaines aux carrefours.
  • 1868 - Le canal de la Siagne (concédé à la Société Lyonnaise des Eaux) amène à Cannes les eaux captées près de Saint-Cézaire.
  • 1888 - Achèvement du canal de la Vésubie. Le canal, d’une longueur de 32 km 700, prend l’eau à Saint-Jean-la-Rivière (cote : 271) qu’il amène jusqu’à Gairaut (cascade - cote : 245).
  • 1892 - Le canal de la Vésubie est prolongé jusqu’à Menton, jusque là réduite aux pompages des eaux du Caréï (Monaco est desservie en 1896).
  • 1907 - Construction d’une usine d’ozonation à Bon Voyage pour stériliser les eaux du Paillon. (Un chercheur niçois, Marius Otto, découvre en 1899 que l’ozone attaque les bactéries et les matières en suspension et met au point un système permettant de purifier l’eau par l’ozone).
  • 1909 - Construction d’une usine d’ozonation à Rimiez pour stériliser les eaux de la Vésubie.
  • 1911 - Le canal du Loup amène à Cannes les eaux captées près de Gréolières.

Le gaz et l’électricité

Cannes

  • 1863 - début des travaux pour l’éclairage des rues au gaz.
  • L’éclairage électrique débute en 1891.

Nice

  • Les travaux de l’usine à gaz commencent en 1851.
  • L’éclairage public au gaz, inauguré en 1854, est étendu à la Promenade des Anglais en 1862 (30 becs de gaz). En 1870, il ne reste à Nice que quatre lanternes à huile (il y en avait 130 en 1850).
  • L’électricité fait son apparition à l’exposition internationale du Piol en 1884. Le nouvel opéra utilise l’électricité en 1889. En 1892, l’avenue de la gare (Jean Médecin) est éclairée à l’électricité.

Vallauris

l’éclairage au gaz débute en 1885.

Nice - Grands travaux et transports publics

  • Le lit du Paillon fait l’objet d’aménagements : 1863 - le Pont des Anges est construit à son embouchure,
  • 1884 : couverture de la place Masséna (englobant le Pont-Neuf), construction du Casino Municipal et du Jardin Albert Ier.
  • 1874 : quatre lignes de voitures à chevaux (“citadines”) partent de la place Masséna.
  • 1894 : naissance de la Compagnie des Tramways Electriques de Nice ; le début du service est assuré à partir de 1895 (première ligne vers Cimiez).
    Un réseau de tout à l’égout est réalisé de 1905 à 1912 ; un collecteur se déverse dans la mer au pont Magnan.