Le photographe Michel Eisenlohr a sillonné notre territoire à la recherche des traces laissées par les fortifications dans nos paysages, silhouettes lointaines et fantomatiques d’un monde disparu. Dans les parties souterraines de nos forts, figées par le temps, il est parti à la recherche des signes témoignant du passé des hommes qui ont vécu et parfois combattu dans ces lieux. D’une photographie à l’autre, Michel Eisenlohr redonne vie à une histoire aux confins de l’oubli.

Un patrimoine remarquable et fragile

Les Alpes-Maritimes sont un véritable conservatoire à ciel ouvert de l’art de la fortification. Au fil des siècles, l’histoire tourmentée de ce territoire, son exposition et la nécessité de le défendre ont contribué à l’édification d’un patrimoine fortifié inestimable. Édifié du XVI e au XX e siècle, celui-ci témoigne d’une histoire maralpine singulière. À la fin du XX e siècle, ces forts sont délaissés par l’armée et soumis aux aléas de l’abandon et du vandalisme. Consciente de l’intérêt patrimonial, mémoriel et touristique de ces édifices, l’Assemblée départementale des Alpes-Maritimes a décidé, le 1 er octobre 2021, de mettre en œuvre un programme d’envergure de sauvegarde, de valorisation et de mise en réseau du patrimoine fortifié Maralpin.

Nous sommes fiers de pouvoir offrir une restitution de ces œuvres, fruit d’un travail artistique de grande ampleur mené depuis plusieurs années, dans l’écrin qu’offre le Parc naturel départemental de la Grande Corniche. Devant le fort de la Revère, clé de voûte du système défensif niçois du XIX e siècle et véritable invitation à la contemplation sur les panoramas méditerranéen, cette première édition de l’exposition itinérante a pour objectif d’apporter un regard nouveau sur l’architecture militaire qui nous entoure.

Le Conseil départemental des Alpes-Maritimes s’est engagé dans une politique de préservation et de valorisation de son patrimoine fortifié. Cette mobilisation unique en France et en Europe, permet au Département d’étoffer son offre touristique et ainsi poursuivre sa volonté incessante de rendre accessible le patrimoine et la culture au plus grand nombre. Cette démarche ambitionne enfin de mener auprès des jeunes générations, l’indispensable travail de mémoire et de transmission, socle commun de notre histoire.

Nous espérons que cette nouvelle vision artistique de nos ouvrages miliaires mis en lumière, vous donnera le goût d’aller découvrir, dès cet été, les joyaux disséminés partout sur le territoire du littoral au haut pays.

Charles Ange GINESY - Président du Département des Alpes-Maritimes

Gardiens de nos cimes, nichés sur les plus hauts sommets ou camouflés au coeur de la roche, les ouvrages fortifiés sont les marqueurs à la fois d’une histoire partagée et d’un espace disputé par les hommes, col après col, vallée après vallée. Durant sept décennies, des années 1870 à la Seconde Guerre mondiale, le territoire actuel des Alpes-Maritimes se couvre de différents ouvrages aux typologies variées : aux forts conçus par Séré de Rivières, avec leurs batteries, redoutes et casernements, succèdent les ouvrages de la ligne Maginot composés de différents blocs reliés sous terre par de longues galeries, auxquelles répondent les constructions du Vallo Alpino, expertes dans l’art du camouflage.

J’ai découvert ce patrimoine souvent méconnu en 2015, lors d’un premier reportage dans les vallées de la Roya et de la Bevera, initié par la DRAC PACA (ministère de la Culture) et qui a abouti à la publication d’un ouvrage aux éditions Arnaud Bizalion. Cette démarche artistique a rencontré la volonté du Conseil départemental des Alpes-Maritimes de préserver et mettre en lumière ce patrimoine. Une collaboration s’est ainsi instaurée sur plusieurs années avec le service du patrimoine culturel sous la forme d’une carte blanche photographique.

Ce reportage sur un temps long, au fil des saisons, a permis une imprégnation du sujet et d’éprouver les terrains. Issu d’une formation universitaire littéraire, avec pour sujet la littérature de voyage et les rites d’Initiation, je me positionne comme un photographe du récit, de la trace et, bien que cela ait l’air commun, de la lumière. Au fil de mes reportages de commande ou mes projets personnels, c’est en effet ce qui guide mon regard sur le terrain, me met en alerte pour capter parfois des instants fugaces. Accompagné par les historiens et les passionnés, il a fallu repérer et cartographier, emprunter les pistes et les chemins, tourner autour des sites et s’enfoncer dans certaines entrailles à la lueur de lampes torches. L’inscription dans les paysages grandioses nous rappelle l’ingéniosité et la pugnacité des hommes, leur engagement pour défendre pied à pied une ligne de crête, mais aussi leur solitude et l’attente. L’horizon et l’intimité.

Pour capturer ces atmosphères et ces émotions, le temps long de la prise de vue est tout aussi nécessaire que de se laisser guider par l’instinct. Car, quel que soit le sujet et la destination, photographier c’est ramener quelque chose de l’ailleurs, de l’autre, et aussi une part de soi-même. L’acte photographique rejoint alors, contrairement à ce que l’on pourrait penser, au dépouillement des apparences. Il s’agit d’essayer par la capture d’une image de révéler l’essence des choses. J’espère ainsi que ces photographies au coeur de ce territoire transfrontalier permettront de voyager dans l’espace et l’empreinte de l’Histoire.

Michel EISENLOHR

Un programme départemental de conservation et de mise en réseau

Le Département des Alpes-Maritimes a ainsi, dans le cadre de ce programme, mis en place un dispositif de soutien financier aux associations, aux communes et aux établissements publics propriétaires ou gestionnaires d’ouvrages. Ce dispositif, doté d’un budget global de 5 millions d’euros, prévoit de soutenir les dépenses d’investissement, pouvant aller jusqu’à 100% du coût des opérations dans certains cas.

De la mer, le fort Royal de Cannes, le fort Carré d’Antibes, aux plus hauts massifs des Alpes-Maritimes, l’Authion, le col de la Lombarde et jusqu’aux ouvrages surplombant le littoral mentonnais, le patrimoine fortifié est présent dans l’ensemble du département. Le Conseil départemental, engagé dans une démarche de diversification de l’offre touristique et culturelle, a souhaité profiter de ce vaste programme de restauration et d’amélioration de l’accueil du public pour élaborer une stratégie de mise en réseau des forts.

Ainsi, le fort de la Revère, à Èze, propriété du Département des Alpes-Maritimes, fait l’objet d’un vaste programme de restauration afin de le préserver et d’en faire un point de départ de la découverte du territoire. Ce projet sera notamment dédié au jeune public, avec pour ambition de faire de ces jeunes générations des « passeurs de mémoire ».

Partenaires institutionnels et financements

Cette exposition a été financée par des fonds de l’Union Européenne dans le cadre de son programme de coopération Interreg VI ALCOTRA entre la France et l’Italie.

Elle est itinérante dans le cadre du projet transfrontalier COGNITIO-FORT et sera présentée dans plusieurs communes du partenariat unissant le Parc National du Mercantour, le Parco Alpi Marittime et l’Unione Montana Valle della Stura.

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